Développement
Le 27 janvier 1915, la DAG chargea la société Ansaldo de fournir des automitrailleuses à l'Esercito. Pour leur réalisation, la société génoise partit d'un châssis dérivé de celui du camion Lancia 1Z (lui même très proche de la voiture 25/35 HP). Largement inspiré du projet sur lequel Guido Corni avait travaillé en septembre 1914, le dessin de l'automitrailleuse fut breveté dès le 14 février 1915.
Le prototype de l'automitrailleuse Lancia 1ZM armé de Vickers-Maxim mod.11 de 6,5 mm fut présenté aux autorités militaires le 17 avril 1915 et testé avec succès le 25 avril.
Le 7 mai, Ansaldo accusa réception de la commande n°2401 du ministère de la guerre portant sur 20 exemplaires de l'automitrailleuse, soit le maximum possible compte-tenu de la disponibilité des mitrailleuses.
Les exemplaires de série se différenciaient du prototype au niveau des ouïes d'aération du capot moteur et des pneus plus grands (135x935 au lieu de 120x880). L'armement devait rester identique à celui du prototype, à savoir deux Vickers-Maxim mod.11 dans la tourelle inférieure et une troisième dans la supérieure. Cependant, les difficultés rencontrées dans l’approvisionnement de ces mitrailleuses contraignirent Ansaldo à armer les 7 premiers exemplaires avec des Maxim-Dreyse de 6,85 mm capturées sur le cargo Bayern.
La première Lancia 1ZM de série fut présentée au général Cadorna début août 1915 à Udine. Mais la production confiée à l'usine Ansaldo Fossati de Sestri Ponente prit du retard : à la fin de l'année, seuls 7 exemplaires avaient été livrés, les 13 restants ne l'étant qu'au premier semestre 1916.
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Exemplaires de la série 1 en attente de livraison à l'usine Ansaldo Fossati. L'armement n'a pas encore été installé. | Lancia 1ZM série 1 armée de mitrailleuses Maxim-Dreyse de 6,85 mm. |
Un deuxième lot de 17 exemplaires fut commandé le 11 mars 1917 au travers du contrat n°979. Cette seconde série se différenciait de la précédente par la substitution du blindage des roues avant par de simples garde-boue, l'ajout de déflecteurs de protection sur les grilles du radiateur et un nouveau découpage du capot moteur. D'autre part, la puissance moteur pouvait être poussée 30% au-dessus du nominal pendant 30 minutes. Les 12 premiers exemplaires du second lot adoptaient le même châssis que les modèles du premier lot, tandis que les 5 suivants recevaient un châssis renforcé.
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Lancia 1ZM série 2 lors de la présentation aux militaires à Gênes en 1917. | Lancia 1ZM série 2 dont la tourelle inférieure est ceinte d'une bande tricolore. |
Si, au début du conflit, les automitrailleuses ne déclenchèrent pas un grand enthousiasme dans le commandement italien, les choses changèrent lorsque le front s’effondra après Caporetto. Le passage d’une guerre de position à une guerre de mouvement donna d’un coup une importance nouvelle aux automitrailleuses. Elles étaient en effet seules capables des actions de reconnaissance et d’arrière-garde que ne pouvaient plus réaliser les unités de cavalerie du fait des mitrailleuses ennemies.
La réaction du commandement fut alors rapide et efficace : 35 automitrailleuses firent l'objet du contrat n°1706 passé le 26 novembre 1917. Le 13 janvier 1918, 65 exemplaires supplémentaires furent ajoutés à la commande. Les 17 premières machines furent livrées au 31 mars 1918. Le 2 mai, 32 exemplaires avaient été produits, puis 16 supplémentaires au 9 juin. En date du 27 août, 83 automitrailleuses de série 3 avaient été prises en charge dans les escadrons de l'armée.
Cette troisième série donnait le jour à une nouvelle version marquée par la suppression de la tourelle supérieure, qui élevait trop le barycentre du véhicule. La mitrailleuse qu'elle abritait fut déplacée en casemate et dirigée vers l’arrière. Les Vickers-Maxim armant les deux premiers lots furent remplacées par des Saint Etienne mod.907 F de 8 mm. Du fait des difficultés d'approvisionnement en matières premières, les tôles au chrome-nickel constituant le blindage furent remplacées par des tôles au molybdène.
Description technique
L'automitrailleuse Ansaldo était basée sur le châssis Lancia 1ZM, version renforcé du 1Z civil au niveau du pont arrière et des ressorts à lames. L'architecture de la caisse blindée était traditionnelle avec deux portes d'accès latérales, une tourelle sur l'arrière et deux profilés coupe-barbelés sur l'avant. Les tôles employées avaient une épaisseur de 6 mm.
L'originalité du véhicule résidait dans ses deux tourelles superposées, pouvant tourner d'un seul bloc ou indépendamment. Seuls les deux premiers lots furent équipés de la tourelle supérieure.
L'armement était à l'origine constitué de trois mitrailleuses Vickers-Maxim mod.11 de 6,5 mm. Sur la troisième série, la puissance de feu fut augmentée du fait du passage à trois mitrailleuses Saint Etienne mod.907 F de 8 mm. À partir de 1924, les mitrailleuses furent toutes remplacées par des Fiat mod.14 de 6,5 mm. En Somalie, les mitrailleuses Fiat mod.14 Aviazione refroidies par air furent préférées.
Le véhicule était propulsé par un moteur essence à 4 cylindres en ligne équipé d'un magnéto d'allumage. Le réservoir de carburant cylindrique logé entre les deux longerons était protégé dans sa partie ventrale par une tôle de 5 mm. La boîte de vitesse à double train baladeur offrait 4 rapports plus marche arrière. Le circuit électrique comprenait une batterie rechargée par une dynamo alimentant le démarreur et l'éclairage.
Les roues étaient à l'origine protégées par un blindage, qui fut supprimé sur le train avant à partir de la seconde série. Sur certains exemplaires de la première série, la protection fut démontée directement sur le front. La substitution des pneus haute pression par des pneus basse pression débuta en 1936.
Les jugements émis durant la Grande Guerre étaient positifs au sujet de la motorisation et de la protection, mais déploraient l'absence d'un second poste de pilotage pour permettre une marche arrière plus aisée. Le véhicule semblait aussi trop lourd et encombrant.
Baptême du feu pendant la Grande Guerre
La formation des équipages fut dispensée par le dépôt génois du 1° rgt.art. da fortezza entre juin et juillet 1915. Les premiers exemplaires livrés furent envoyés sur le front de l'Isonzo pour des missions de reconnaissance. Dès juin 1916, l’organisation des automitrailleuses fut établie sur la base de plusieurs squadriglie (escadrons) :
- la 1a squadriglia sur 6 Lancia 1ZM et une Bianchi en réserve attachée à la 5a A ;
- la 2a squadriglia sur 6 Lancia 1ZM et une Bianchi en réserve attachée à la 1a A ;
- la 3a squadriglia sur 6 Lancia 1ZM plus une en réserve attachée à la 1a A.
Au mois de juillet 1916 vinrent s'ajouter les 4a et 5a squadriglie affectées respectivement à la 2a A et à la 4a A.
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Lancia 1ZM série 1 pendant l'hiver 1915-1916 à Romans d'Isonzo. | Deux Lancia 1Z série 1 en 1916. | Lancia 1Z série 1 sur la route de Vertojba à l'été 1916. |
Il convient de relever que les automitrailleuses ne furent pas particulièrement mises en valeur sur le front alpin, où leur mobilité n’était utile que dans les phases de mouvement. Ainsi, lors de l'offensive austro-hongroise dans le Trentin en mai-juin 1916, elles furent placées en réserve pour repousser une éventuelle percée. En 1917, certaines furent utilisées dans des missions de maintien de l'ordre. Avec l'entrée en ligne des exemplaires de la seconde série, deux squadriglie supplémentaires furent crées.
Durant la retraite de Caporetto, 10 automitrailleuses Lancia 1ZM furent perdues dans des combats d'arrière-garde. Certaines furent capturées par les forces austro-allemandes et réarmées avec des mitrailleuses Schwarzlose M7/12 pour être employées contre les Italiens à partir d’Udine. À l'issue de la retraite, le Regio Esercito disposait de 28 Lancia 1ZM qui furent réorganisés sur 4 squadriglie, bientôt renforcées par les exemplaires de série 3.
Deux Lancia 1ZM furent encore perdues lors de la seconde bataille du Piave, 4 durant la bataille de Vittorio Veneto et 2 furent cédées au corps d'armée tchécoslovaque entre 1918 et 1919.
À la fin de la première guerre mondiale, l’armée italienne disposait de 16 squadriglie répartis dans les unités suivantes :
- 1a A (3a et 11a squadriglie) ;
- 3a A (7a squadriglia) ;
- 8a A (1a et 16a squadriglie) ;
- Gouvernorat de Dalmatie (12a et 13a squadriglie) ;
- Secteur d’occupation international de Fiume (4a et 5a squadriglie) ;
- Commandement supérieur de la Force Interalliée dans les Balkans (14a squadriglia) ;
- Corps d'Armée de Milan (6a squadriglia dont une section à Bologne) ;
- Corps d'Armée de Genève (8a squadriglia) ;
- Corps d'Armée de Rome (9a squadriglia dont une section à Florence) ;
- Corps d'Armée de Naples (10a squadriglia dont une section à Bari) ;
- Corps d'Armée d'Assaut en Libye (15a squadriglia).
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Exemplaires de la série 3 tout juste livrés dans la caserne de San Benigno en mars 1918. | Lancia 1ZM série 1 de la 1a squadriglia en avril 1918. | Squadriglia de Lancia 1ZM série 3 lors d'un exercice au printemps 1918. |
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Lancia 1ZM série 3 sur le Piave en juin 1918. | Lancia 1ZM série 1 défilant devant le duc d'Aoste après la seconde bataille du Piave le 24 juillet 1918. | Lancia 1ZM série 3 à Innsbruck lors de l'occupation italienne de 1918-19. (crédits photo : Ministero della Difesa) |
Opérations entre deux guerres
Entre 1919 et 1920, les Lancia 1ZM de la 4a squadriglia et certaines de la 7a squadriglia participèrent à l'action de D'Annunzio sur Fiume (l'actuelle Rijeka). Dans les années 1920, 35 exemplaires furent affectés à la Regia Guardia di PP.SS. Après sa dissolution, elles passèrent aux CC.RR. et aux sections blindés de la MVSN à Milan, Rome ou encore Vérone.
Dès 1919, les opérations de reconquête de la Libye nécessitèrent l'envoi dans cette colonie de 8 Lancia 1ZM, suivies de 3 autres en janvier 1923. Elles formèrent deux squadriglie encadrées au sein du III btg. Cacciatori d'Africa stationné à Benghazi. Après la perte de 2 automitrailleuses à Bir Bilal, les squadriglie furent réunies en une seule en septembre 1923.
Entre les deux guerres, l'Italie céda une Lancia 1ZM à l'Afghanistan en 1928, une autre à la Hongrie, 4 à l'Albanie qui les utilisa jusqu'en 1939 et 4 à l'Autriche en 1934.
Quatre Lancia 1ZM furent affectées au btg. San Marco et envoyées en Chine, à Tien Tsin, en mars 1932, afin d'assurer la protection des ressortissants Italiens. Elles y restèrent jusqu'à l'armistice de septembre 1943, date à laquelle on perd toute trace d'elles.
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Une des 4 Lancia 1ZM du btg. San Marco à Tien Tsin en 1937. | Lancia 1ZM du btg. San Marco à Tien Tsin à la fin des années 1930. |
Dès 1926, une squadriglia sur 4 automitrailleuses fut envoyée en Somalie au sein du RCTC. Deux d'entre elles furent protagonistes de l'incident frontalier de Welwel (Ual Ual en italien) le 5 décembre 1934.
Pour la campagne d'Éthiopie, le rgt. carri armati envoya en Somalie la 1a squadriglia speciale S constituée en mars 1935 à Bologne sur 3 sections de 4 Lancia 1ZM chacune. Débarquée à Mogadiscio le 17 mai 1935, elle fut renforcée par une seconde squadriglia mixte en avril 1936.
Le 1er février 1936, le I btg. automotoblindo Casali débarqua en Érythrée, à Massaoua. Constitué de deux compagnies dont une sur 3 pelotons de 4 automitrailleuses plus une automitrailleuse de commandement, il prit part à l'action sur Gondar.
Après la conclusion de la campagne, les Lancia 1ZM restèrent en AOI jusqu'à la chute de l'empire en 1941. Dix d'entre elles furent réarmées avec des mitrailleuses Fiat mod.35 de 8 mm.
Le 5 janvier 1937, une squadriglia sur deux sections d’automitrailleuses Ansaldo 1ZM (soit 8 véhicules, dont une à double tourelle) débarqua à Cadix, en Espagne, pour renforcer le CTV du gen. Roatta. Cette unité participa à l'occupation de Malaga le 8 février 1937 avant d'être incorporée au rgpt. carri d'assalto e autoblindo puis au CRS du col. Rivolta pour combattre à Guadalajara. Devenue rgpt. reparti specializzati le 15 octobre 1937 et passée sous commandement du col. Babini, l'unité combattit à Santander, en Aragon, sur le front de l'Èbre et en Catalogne, perdant au total 5 automitrailleuses. Les 3 exemplaires encore en état de marche furent cédés à l'armée espagnole à la fin du conflit.
La guerre civile espagnole mit en évidence le besoin de disposer d'automitrailleuses plus modernes à l'image des BA 6 soviétiques, face auxquelles les Lancia 1ZM se trouvaient complètement dépassées.
Fin de carrière dans la seconde guerre mondiale
Malgré leur grand âge, les 34 exemplaires de Lancia 1ZM dont disposait encore l'Esercito en métropole en juin 1940 furent utilisés jusqu'en 1943. Quelques uns furent envoyés dans les Balkans et un peloton gagna Rhodes pour être incorporé dans la compagnie de commandement du CCCXII btg.ftr.carrista. Enfin, 13 Lancia 1Z débarquèrent à Tripoli le 15 janvier 1941 à la demande de SUPERASI. L'une d'elles fut utilisée pour le tournage du film Giarabub d'Alessandrini, sorti le 9 mai 1942.
Après l'armistice du 8 septembre 1943, les forces allemandes utilisèrent quelques Lancia 1ZM dans les Balkans.
Longueur | 5610 mm |
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Empattement | 3350 mm |
Largeur | 1940 mm |
Voie avant / arrière | 1400 / 1428 mm |
Hauteur | 2900 mm (tourelles superposées) 2480 mm (tourelle simple) |
Poids en ordre de combat | 4200 kg (tourelles superposées) 3950 kg (tourelle simple) |
Équipage | 6 |
Moteur | Type 1Z essence 4 cylindres 4940 cm3, développant 35 ch à 1200 tr/min |
Vitesse maximale | 60 km/h sur route |
Autonomie | 500 km sur route |
Emport en carburant | 100 L |
Protection | 2,5 à 6 mm |
Armement | Séries 1 et 2 : 3 mitrailleuses Vickers-Maxim mod.11 de 6,5 mm Série 3 : 3 mitrailleuses Saint Etienne mod.907 F de 8 mm Après 1924 : 3 mitrailleuses Fiat mod.14 de 6,5 mm (12 000 coups) |
Sources :
- La meccanizzazione dell'esercito dalle origini al 1943, Tomo II, Lucio Ceva & Andrea Curami, USSME, 1994
- Gli Autoveicoli da combattimento dell’Esercito Italiano, Volume primo (dalle origini fino al 1939), Nicola Pignato & Filippo Cappellano, Stato Maggiore dell’Esercito, Ufficio Storico, 2002
- Automitragliatrici blindate e motomitragliatrici nella grande guerra, Nicola Pignato, Gaspari editore, 2012
- A century of italian armored cars, Nicola Pignato, Mattioli 1885, 2008
- Autoblindo AB 40, 41 e 43, Filippo Cappellano, Storia Militare, 2011
- Camion Lancia, Massimo Condolo, Fondazione Negri, 2001
- Italian armoured vehicles 1940-1943 : A pictorial history, Luca Massacci, Roadrunner, 2013
- Mezzi dell'Esercito Italiano 1935-45, Ugo Barlozzetti & Alberto Pirella, Editoriale Olimpia, 1986
- Soldati d'Africa, Storia del colonialismo italiano e delle uniformi per le truppe d'Africa del Regio Esercito Italiano, Volume terzo, 1914-1929, Renzo Catellani & Gian Carlo Stella, Ermanno Albertelli Editore, 2006
- Libia.WW2, 1911/1943 – Foto inedite 2, Lorenzo Bovi, Edizioni Ardite, 2015
- La guerriglia cirenaica sino alla svolta sul 29° parallelo, Ferdinando Pedriali, Storia Militare n°260, 2015
Pour reproduire ce véhicule :
Fabricant | Échelle | Référence et désignation | Galerie |
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MR Panzer | 1/72 | MP16 Lancia 1ZM | - |
Retrokit | 1/72 | R72016 Lancia 1Zm | - |
CRI.EL Model | 1/35 | R101 Lancia 1ZM armoured car | - |
CRI.EL Model | 1/35 | R104 Lancia 1ZM armoured car "Spain" | - |
CRI.EL Model | 1/35 | R105 armoured car "SS Bozen" | - |
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